Présentation de Chantal SPENDERNée à Paris en 1947, ingénieur en aménagement urbain, puis consultante en communication institutionnelle, je me consacre totalement à la peinture depuis 2002. Je vis maintenant dans le Nord de la France. Je ne m'impose pas de programme stylistique particulier. D'une toile à l'autre, je passe de la figuration à l'abstraction. Je m'en tiens aux impulsions de mon inspiration et aux exigences de mon oeil. Dans l'agencement des couleurs et des espaces, je cherche à atteindre l'équilibre. Une maxime : "le rêve comme la peinture, la peinture comme le rêve".
Démarche artistique de Chantal SPENDERUne peinture de la trace
Couleurs chaudes, radiations de l'orangé, de rouges, couleurs riches, couleurs de la mémoire, de l'inactuel, du souvenir brûlant et tamisé, couleurs d'un tempérament, de l'automne, de la rouille, le temps à l'oeuvre, l'oeuvre naissant du feu. Les nuances chromatiques de Chantal Spender distillent le temps, ses images l'évoquent. Des escaliers vides, des portes, des adresses : la durée semble suspendue entre un avant et un après.
Comme les collages jaunis du dadaïste suisse Kurt Schwitters, ses toiles abstraites laissent paraître des typographies à peine lisibles, les événements en train de s'effacer : "Le rêve comme la peinture, la peinture comme le rêve", dit l'artiste qui passe d'une toile à l'autre sans se soucier que la forme d'expression soit la figuration ou la non-figuration. Elle range, "ortho-nomme", dresse son tableau tel un plan mystérieux et intime. La peinture de la trace, de l'empreinte : Un homme et une femme, deux taches dont on distingue les profils dans les tonalités de jaunes orangés rugueux.
Perdant cet effet de lumière chaude, ses paysages lui permettent de travailler la surface de la toile et de construire des compositions abstraites. Une certaine figuration lyrique et suggestive vacille. Les couleurs sombres, couleurs de la terre au crépuscule, inspirent une vision romantique, mélancolique, hugolienne de la nature (Autour de l'étang 2). L'artiste obéit à ses émotions. La musique, elle l'entend à travers l'intensité de ses monochromes. L'assemblage de ses carrés les uns à côté des autres marque les rapports des couleurs entre elles, le rythme né des contrastes. Dans sa toile intitulée Boogie-Woogie, Mondrian joue sur les carrés, les points, les tirets et les couleurs vives; les verticales et les horizontales syncopent sa musique pure et plastique.
Chantal Spender ne peint pas de nus, ni vraiment de visages. Sa façon d'envisager la présence humaine est indirecte et pudique. Un buste primitif rappelant une idole des Cyclades. Des silhouettes d'hommes peints de dos, dissimulés sous des longs manteaux marchent vers un ailleurs abstrait. Ils portent des chapeaux noirs : des gangsters ou bien des souvenirs de Kasimierz, le quartier juif de Cracovie? Métaphoriquement sur la même toile, ils apparaissent en négatif comme des spectres. La figuration se prête toujours à des interprétations, c'est une narration dont le mystère fait l'oeuvre.
Une femme, plutôt une ombre, s'abrite sous un parapluie dans l'atmosphère humide de la rue étroite d'une vieille ville. Chantal Spender peint par allusion. Ses touches sont larges et sensuelles, l'onctuosité de l'huile, du pur plaisir. L'idée de mémoire, de la trace, reste son fil conducteur.
Dans le jardin est une oeuvre qui échappe à la rigueur de la composition qui caractérise la plupart de ses toiles abstraites. L'accumulation des volutes comme des nuages lui donne un aspect baroque. Les couleurs les plus sombres sont douces, transparentes, leur direction ascendante rappelle la poésie délitée, légère, aérienne, flottante d'une toile de Chagall. L'artiste passe de la figuration à la non-figuration sans difficulté. |